Une étude théorique codirigée par un chercheur de l'IPhT prédit de nouvelles signatures expérimentales d'états d'isolants cristallins topologiques  
Les états d'isolants topologiques (topological insulators, TI) sont des phases quantiques de la matière qui sont isolantes à l’intérieur de leurs volumes (3D) et conductrices sur leurs surfaces (2D).   Des matériaux à l'état solide contenant des phases TI ont été identifiés expérimentalement presque immédiatement après avoir été proposés théoriquement, grâce au fait que les états conducteurs de surface caractérisant les TI peuvent être détectés avec des expériences de microscope à effet tunnel et de photoémission. Au cours des 15 années qui se sont écoulées depuis la découverte des TI, nous avons appris que des milliers d'autres matériaux présentent des caractéristiques topologiques, cependant originés par des mécanismes distincts de ceux decrits par la théorie qui sous-tend les TI.  En particulier, on a récemment découvert que, parmi les matériaux topologiques isolants 3D présents dans la nature, la plupart sont en fait des isolants cristallins topologiques (TCI en anglais) qui, contrairement aux TI, présentent des volumes (3D) et des surfaces (2D) isolants et, tout au plus, des canaux conducteurs sur leurs bords 1D ("charnières") .

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Figure a : La nouvelle phase de la matière « isolant à axion doublé » (T-DAXI) découverte dans ce travail peut être construite comme un isolant axionique (AXI) par "spin" électronique. Sa surface présente une réponse  « quantum spin Hall » exotique (Cs) consistant en un état de Hall quantique fractionnaire (C+ or C-) par spin.   Figure b : L'équipe a découvert  que le bromure de bismuth, un isolant quasi-1D, est une réalisation matérielle d'un T-DAXI.

 

 

À la suite d'expériences pionnières sur le bismuth élémentaire réalisées par le groupe Meso du LPS-Orsay à Saclay (https://www.nature.com/articles/s41567-018-0224-7), des « états charnière » 1D fortement métalliques ont été observés dans un certain nombre de candidats ITC.  Cependant, de récentes avancées théoriques et d'autres expériences ont soulevé la question de savoir si la conduction dans les « états charnière » représente réellement une signature expérimentale exclusive d'un TCI, ou simplement un effet intéressant - mais extrinsèque.

Afin d'éclaircir ce problème, une équipe internationale a prédit,  in une nouvelle étude codirigée par Benjamin Wieder (IPhT), de nouvelles signatures en volume (3D) et en surface (2D) des états TCI.  En se concentrant sur le degré de liberté du spin, l'équipe a découvert, grâce à des calculs numériques approfondis, que les surfaces (2D) isolantes des TCI ne sont pas dépourvues de caractéristiques, comme on le supposait auparavant, mais qu'elles contiennent plutôt un schéma nouveau - et inamovible - de mouvement électronique consistant en des orbites circulaires contra-propagatives qui varient en fonction du "spin" de chaque électron.  L'équipe a notamment découvert que ce modèle se distingue du comportement des électrons dans tous les autres isolants 2D connus présentant de faibles interactions électron-électron, et qu'il peut être mesuré au moyen d'expériences optiques.  Enfin, l'équipe a identifié le bromure de bismuth, un matériau facilement accessible, comme un TCI hébergeant cette nouvelle phase de surface (2D), ce qui permet d'espérer que les résultats théoriques de cette étude seront validés expérimentalement dans un avenir proche.

L'article est paru dans la revue Nature Communications.

Pour en savoir plus:
https://www.eurekalert.org/news-releases/1031456

E. De-laborderie, dépêche du 17/01/2024

 

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